Extrait 1/3

Eudes III, duc de Bourgogne, Gaucher III de Châtillon, comte de Saint-Pol et Simon de Montfort seigneur de Montfort-l’Amaury sont à la tête d’une armée de 30 000 hommes. La veille, ils ont envoyé une poignée de ribauds dans la cité de Béziers afin de se faire ouvrir les portes.

Au petit matin, la ville est encerclée par une marée humaine armée jusqu’aux dents.

Vesiat qui s’était endormi complètement ivre au sommet des remparts ouvre les yeux, inquiet de ce silence matinal. Il se redresse et aperçoit les soldats qui restent immobiles. Que veulent-ils ? Sans comprendre ce qu’il se passe, il bondit et se met à courir chez dame Beatritz. Il tambourine à la porte en criant :

— Ils sont là, tous aux abris, vite !

Les voisins se réveillent et on commence à entendre des cris dans les rues. En levant les yeux vers les tours de guet on constate que ces dernières sont vides, plus exactement on ne voit pas le cadavre des guetteurs au sol. Les portes de la ville s’ouvrent, les gardes étendus par terre, sans vie.

Levée par le pape Innocent III, cette croisade contre les hérétiques cathares tenus pour responsables de la mort de son légat est présente pour les éradiquer. Conduite sous la direction du légat l’abbé de Cîteaux, Arnaud Amaury, les soldats qui se sont engagés pour tuer les hérétiques lui demandent :

— Comment reconnaître les hérétiques des nôtres ?

L’abbé de Cîteaux, leur répond :

— Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens !

Les soldats se précipitent glaive en l’air hurlant « mort aux hérétiques ! ». Tous les habitants qu’ils croisent se font trucider, les enfants égorgés sous les yeux de leurs mères avant que ces dernières ne soient violées puis éventrées. C’est une véritable boucherie. Les soldats sont si nombreux que tous ne peuvent entrer.

Martin court à travers les ruelles en tenant la main de son fils, suivi par sa femme. L’église de la Madeleine n’est plus très loin, elle constitue l’abri idéal. Les quelques soldats présents livrent bataille et on les entend croiser le fer avec bravoure. Mais les assaillants sont trop nombreux, les murs de la ville se couvrent de sang. Les hurlements sortent de chaque maison, les corps s’amoncellent ici et là. On entend les soldats courir et pousser des cris de sauvages. Personne ne comprend ce qu’il se passe. Pourquoi tant de cruauté en cette cité de paix où il fait bon vivre ? Pourquoi ces Français viennent trucider les leurs ? Sont-ils devenus fous ?

Une tête d’enfant roule aux pieds de Martin qui s’écarte pour l’éviter. C’est une horreur. Héran pleure se laissant tirer par son père dans la précipitation. Alors qu’il débouche sur une artère plus importante, une épée transperce le négociant qui s’arrête net, regardant hagard cette lame qui lui coupe le souffle. Hébété, il se voit se vider de son sang ; ses forces l’abandonnant, il tombe à genoux, lâche la main de son fils avant de s’étendre sur le dos, les yeux sans vie :

— Papa !

Magdalena hurle de terreur. Le soldat retire son épée du corps du malheureux, et, alors qu’il s’apprête à fendre le crâne de l’enfant en la levant au-dessus de la tête de ce dernier, un cheval passe au triple galop, décapitant le soldat d’un coup de glaive. La tête roule dans le caniveau, le reste du corps s’écroulant sur lui-même dans une mare de sang. Un second cheval arrive dans le dos de Magdalena et la saisit sans ménagement en la mettant en travers sur sa selle, suivi par une autre monture qui s’empare du petit Héran.

Béziers est à feu et à sang.

Ils passent devant l’église de la Madeleine, là où la petite famille pensait trouver refuge : à l’intérieur il est en train de se dérouler un véritable massacre. Des centaines d’hommes en arme trucident hommes, femmes, enfants dans un bain de sang jamais vu. C’est un génocide organisé par l’Église de Rome.

Les cavaliers foncent vers la sortie en hurlant « prise de guerre, laissez passer ! ». On s’écarte sur leur passage et très vite ils s’éloignent de l’enfer des lignes ennemies. C’est ainsi que commence la mise à feu du Languedoc. Béziers est entièrement brûlée, ses habitants massacrés. C’est le commencement de la première croisade contre les Albigeois, la première croisade des chrétiens contre d’autres chrétiens. Parmi les tortionnaires sans pitié, Simon de Montfort, celui qui deviendra un des plus grands bourreaux de tous les temps envers les siens.

Béziers étant sous le protectorat du jeune Vicomte Roger de Trencavel qui demeure à Carcassonne, ce dernier est destitué par décret le jour même et tous ses biens sont attribués au bourreau de ses sujets : Simon de Montfort.

 

Extrait 2/3

Le sol a lui aussi été refait et représente un vaste échiquier avec son dallage noir et blanc de soixante-quatre cases dont les angles sont orientés vers les points cardinaux.

Ravi d’apprendre la bonne nouvelle de la fin des travaux, Monseigneur Félix Billard, évêque de Carcassonne accepte de venir bénir ce lieu le 6 juin 1897.

Tout d’abord, il ne s’attendait pas à trouver tant de laideur dans un lieu de culte. Il est surpris mais après tout, pourquoi pas, se dit-il. Soudain, alors qu’il vient tout juste de franchir les portes de l’édifice il est pris d’un malaise. Ce lieu lui paraît inhospitalier, hanté.

Tant bien que mal, l’évêque se redresse, lutte contre cette présence aussi effrayante qu’oppressante et lève péniblement son goupillon comme dans un ultime effort. Ses mots ont du mal à sortir de sa bouche, ses gestes sont imprécis et la foule qui s’est déplacée pour l’occasion se demande ce qu’il se passe.

L’évêque de Carcassonne avait promis à Bérenger qu’il ne l’abandonnerait pas. C’est la raison pour laquelle il se faisait une joie de venir, mais la cérémonie doit être écourtée et c’est à toutes jambes que l’ecclésiastique s’enfuit de cette église pour ne plus jamais y revenir.

Il faut dire que sur le fronton de l’église il est gravé « TERRIBILIS EST LOCUS ISTE » ce qui signifie « CE LIEU EST TERRIBLE ». Cette inscription fait référence aux paroles de Jacob à Bethléem. On retrouve cette inscription sur le tympan de quelques lieux de culte qui demeurent relativement rares comme l’église Saint-Georges à Lyon. Mais cette citation complète est plus exactement :

TERRIBILIS EST LOCUS ISTE

HIC DOMUS DEI EST

ET PORTA CŒLI

Ce qui signifie :

CE LIEU EST TERRIBLE.

C’EST LA MAISON DE DIEU

ET LA PORTE DU CIEL.

Or, ce qui peut déranger les pieux visiteurs de l’église Sainte Marie-Madeleine de Rennes-Le-Château, c’est qu’on ne lit que la première ligne et un peu plus loin on retrouve le message « Méa domus orationis vocabitur » ce qui donne :

TERRIBILIS EST LOCUS ISTE

VOS AUTEM FECISTIS EAM SPELUNCAM LATRONUM

Signifiant

CE LIEU EST TERRIBLE.

VOUS EN AVEZ FAIT UNE CAVERNE DE BRIGANDS

Et Monseigneur Billard ne s’y est pas trompé d’autant plus qu’à l’entrée se trouve un bénitier surmonté des initiales « B.S. » posé sur la tête d’Asmodée, l’intendant des maisons de jeux aux Enfers, démon destructeur à qui on impute le massacre des sept époux successifs de Sara.

 

Extrait 3/3

Le pillage dure trois jours et tous ceux ayant trouvé refuge dans une église sont épargnés. La princesse Aelia Galla Placidia, fille de l’empereur Théodose et demi-sœur de l’empereur romain d’Occident Honorius, est violée avant d’être emmenée comme otage par les Wisigoths. Les coffres sont vidés, des chariots remplis d’or, de diamants et autres pierres précieuses. Alaric, Athaulf et ses lieutenants ont découvert les chambres secrètes contenant le trésor du temple de Salomon dont le fameux Menorah, ce gigantesque chandelier à sept branches. Ils ne laisseront pas la moindre poussière d’or. C’est la razzia et des colonnes entières de chariots prennent le chemin de Toulouse sous bonne escorte. Tout est emporté sauf le Menorah. Car Alaric a sa petite idée derrière la tête : se servir de ce gigantesque candélabre pour asseoir sa puissance et intimider la population et ses défenseurs. En effet, pillé de ses plus grandes richesses, l’Empire romain a un genou à terre, c’est le début de sa chute. C’est donc le moment idéal pour continuer d’envahir les territoires de l’Empire. Le roi des Wisigoths se lance dans à la conquête de l’Afrique romaine en passant par la Sicile.

Hélas, au cours de cette même année, la chance tourne. Lors d’une tempête, tous les bateaux des Wisigoths se retrouvent fracassés et Alaric 1er meurt de la fièvre. Avant de rendre son dernier souffle il confie la garde d’Aelia Galla Placidia à Athaulf qui, sans surprise, est élu roi. Ce dernier renonce au projet africain et remonte vers le nord de l’Italie pour ramener ses troupes en Gaule.

Cependant, alors que tout le monde prend le chemin du retour, le nouveau roi reste sur place à Cosenza, en Calabre, avec une poignée d’esclaves pour enterrer seul son prédécesseur et ami. Il fait déplacer le cours du fleuve Bussento en créant un barrage de la rive au centre du cours d’eau. Les hommes parviennent à faire faire un coude au Bussento et lorsque la tâche est terminée, ils creusent un trou assez profond au milieu du lit du fleuve. C’est dans cette tombe qu’est inhumé Alaric 1er roi des Wisigoths avec le Menorah qu’il s’était approprié. Il s’agit d’une des plus grandes richesses religieuses qui n’a d’égale que celle accordée au Graal.

Quand la tombe est recouverte, Athaulf fait détruire le barrage pour que le fleuve reprenne sa place, et fait disparaître toutes les traces qui auraient pu indiquer d’éventuels travaux à cet endroit précis. Le travail terminé, Athaulf tue tous les esclaves afin d’être certain que le secret sera gardé à tout jamais.

Seul sur sa monture, il repart rejoindre ses hommes partis au-devant.

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